Interview du Maire de Saint-Maur-Des-Fossés

« À Saint-Maur-des-Fossés, nous avons fait le choix d'un urbanisme à taille humaine, d'une ville à portée de marche et d'un cadre de vie protégé. »

Maire de Saint-Maur-des-Fossés depuis 2014, Sylvain Berrios entend protéger le cadre de vie privilégié de sa ville en misant sur un urbanisme équilibré, entre préservation des zones pavillonnaires, limitation des constructions et protection de la biodiversité.

Alors que l'enquête publique concernant le futur PLUI arrive à son terme, vous défendez un « urbanisme équilibré et à taille humaine » pour Saint- Maur. C'est-à-dire ?

À Saint-Maur-des-Fossés, nous avons fait un choix singulier en Ile-de-France et en petite couronne, hérité du concept de « ville-jardin » cher à Auguste Marin, l'un de mes prédécesseurs au début du XXème siècle : celui d'un urbanisme à taille humaine, d'une ville à portée de marche et d'un cadre de vie protégé. Ce choix définit l'identité même de la ville,

qui repose d'abord sur sa géographie. Saint-Maur-des-Fossés est en effet une presqu'île, entourée par la dernière boucle que forme la Marne avant de se jeter dans la Seine. Par conséquent, il est fondamental d'y préserver un équilibre démographique et de protéger les quartiers pavillonnaires, qui garantissent aujourd'hui au sein du Plan Local d'Urbanisme (PLU) municipal 50 % d'espaces verts de pleine terre minimum. Ils permettent non seulement la biodiversité en ville, mais ils sont de surcroît une protection efficace contre le risque de crue auquel une très grande partie du territoire de la commune est soumis, en permettant l'infiltration de l'eau à la parcelle. Ce choix est aussi celui du respect de la nature, par la protection de la trame verte et de nos 18 000 arbres d'alignement, l'un des plus riches patrimoines arborés d'Ile-de-France qui procure d'indispensables îlots de fraicheur ; le choix de la protection de notre rivière la Marne, avec l'objectif de retour à la baignade ; le choix enfin de limiter strictement la hauteur des constructions à 4 étages, uniquement sur les grands axes de la ville afin d'offrir un parcours résidentiel complet et de lutter contre l'habitat indigne.

Comment continuer à défendre le cadre de vie privilégié de la Ville face aux pressions de l'Etat pour une densification massive de la Métropole du Grand Paris ?

Aujourd'hui, le projet de PLU intercommunal intègre les principes fondamentaux évoqués : limitation des hauteurs de construction, protection des quartiers pavillonnaires, de la trame bleue, la Marne, et de la trame verte. Mais sans son avis rendu le 17 mars dans le cadre de l'élaboration du PLUI, l'Etat a réaffirmé sa volonté de densification massive, en particulier au sein des quartiers pavillonnaires, à laquelle je suis totalement opposé. J'ai donc demandé à tous les Saint-Mauriens de m'aider pour protéger la voie d'un urbanisme équilibré et à taille humaine pour les vingt prochaines années. La meilleure protection contre la volonté de densification massive de l'Etat reste l'intégration et le respect des choix de Saint-Maur au sein du futur PLUI et de la stricte intégration de ses règles d'urbanisme. Chaque Saint-Maurien peut participer jusqu'au 1er juillet à l'enquête publique à ce sujet, et ils sont déjà plusieurs milliers à m'avoir exprimé leur soutien pour cela.

Depuis 2018, la Ville suit une stratégie de développement durable « Saint- Maur ville durable 2018-2025 ». Quels en sont les grands objectifs ?

À Saint-Maur, l'équipe municipale s'est emparée il y a plusieurs années des enjeux de transition environnementale et énergétique. Nous avons mis en place un plan d'actions ayant conduit d'une part à l'apaisement de la circulation afin de permettre le développement harmonieux des mobilités douces, en cohabitation avec l'ensemble des modes de déplacement : limitation de l'ensemble de la ville à 30 km/h, fermeture des rues apaisées aux abords des écoles, adoption d'un schéma cyclable, fermeture de l'ensemble des bords de Marne à la circulation tous les dimanches, lutte contre la pollution par l'interdiction du transit des poids lourds de plus de 19 tonnes dans la ville, déploiement d'ici à la fin de l'année de près d'une centaine de points de recharge pour les véhicules électriques... Ces actions concernent également l'espace public et l'ensemble des bâtiments communaux... Effectivement, la Ville de Saint-Maurdes-Fossés travaille aussi à sa transition énergétique dans l'espace public et dans l'ensemble des bâtiments communaux. Ainsi, l'ensemble des travaux engagés dans les écoles de la ville contribuent à l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments, qu'il s'agisse des toitures ou des remplacements d'huisseries. Les nouveaux bâtiments intègrent les normes « haute qualité environnementale » (HQE) et la prise en compte d'équipements durables, comme c'est le cas de notre nouvelle Maison des Etudiants, ouverte il y a quelques semaines, dont l'ensemble du mobilier et du matériel sont issus du recyclage. La Ville a également un marché de performance énergétique de plus de 20M€ sur dix ans, permettant le remplacement de l'ensemble de l'éclairage public par de l'éclairage LED, beaucoup moins énergivore. C'est aussi le cas de nos stades et gymnases. De plus, nous allons engager la déminéralisation et la renaturation des grandes places de la ville afin de redonner davantage d'espace au végétal. Enfin, un dispositif innovant verra le jour dans les prochains mois avec la création d'une société d'économie mixte pour favoriser le développement des énergies renouvelables à niveau local.

En matière de développement durable, on sait que chaque geste compte. Comment

améliorer la sensibilisation ?

La sensibilisation en matière de développement durable passe en premier lieu par une participation directe des riverains aux actions menées par la Ville. C'est au quotidien au sein de la Maison de la Nature, ouverte à tous, ou auprès de nos écoliers qui bénéficient de nombreuses actions de sensibilisation au sein du jardin pédagogique et ont participé récemment au renouvellement du patrimoine arboré des bords de Marne. La 2ème édition de la Fête de la nature, il y a quelques jours, a elle aussi rencontré un franc succès. Les commerçants sont également très impliqués et sont invités à signer une charte des bonnes pratiques énergétiques, visant notamment à réduire la consommation d'électricité et incidemment à réduire la pollution lumineuse. L'ensemble de ces actions contribue à la protection de notre cadre de vie.

La construction est un des domaines qui émet le plus de CO2. Comment Saint-Maur agit-elle pour réduire l'empreinte carbone de ses constructions ?

La réduction des émissions de CO2 dans le domaine de la construction repose sur la maîtrise des projets d'aménagements, restreints aux principales voies de circulation de la Ville, c'est-à-dire à seulement 7 grands axes, et limités dans leur hauteur à R+4. Le choix des matériaux est également essentiel. La Ville fait preuve d'une grande vigilance à ce sujet. Mais plus que tout, c'est la préservation des quartiers pavillonnaires et des coeurs d'îlots d'une part, et la protection des zones naturelles de Saint-Maur d'autre part, qui permettent la captation du carbone, contribuent à préserver la ville de la pollution et contribuent à la lutte contre le réchauffement climatique.

Saint-Maur a fait le choix de protéger la Marne et sa biodiversité. De quelles manières ce choix se traduit-il au quotidien ?

La Marne et la biodiversité de la ville sont deux principes sacrés à Saint-Maur : la trame bleue et la trame verte. Toutes deux sont protégées au sein du PLU municipal et nous nous battons pour qu'elles le soient aussi au sein du futur PLUI. Les arbres d'alignement, les bords de Marne, les parcs et jardins qui abritent tous une riche flore et faune sont protégés. Le combat pour permettre le retour à la baignade en Marne est tout aussi essentiel, car une rivière baignable est le signe d'un environnement en bonne santé. Le 9 juillet prochain a lieu le Big Jump, moment phare pour sensibiliser la population mais aussi l'ensemble des acteurs publics à cet enjeu fondamental.